Des ukrainiens se sont arrêtés au Cateau

Acquise dans le années 50 par la communauté ukrainienne du Nord, la propriété de 7 000m2 au Cateau Cambrésis a été oubliée par ces derniers et finalement rachetée et rasée par la ville.  L’article a été retranscrit mot pour mot afin d’en faciliter la lecture. Une photo d’époque a  été ajoutée afin d’illustrer les propos. Date et source de l’article inconnues


Jusqu’au début de l’année, ils [les Ukrainiens] y possédaient une propriété qui fut un centre culturel et religieux déserté depuis 1975.

Si la contribution de l’émigration polonaise à l’essor économique du Nord est connue, celle de sa minorité ukrainienne l’est moins. Dans les années 30, des ukrainiens prennent la route de notre région qui réclame des bras. Vingt ans plus tard sous l’impulsion de l’abbé Narozniak, aumônier des ukrainiens du Nord de la France, des familles s’associent pour acheter une propriété de 7000 m2 au Cateau-Cambrésis que vient d’acquérir la ville.

A la fin des années 50, la communauté ukrainienne rachète auprès des capucins une propriété afin d’entretenir la mémoire et de perpétuer la tradition. Mais au fur et à mesure que l’intégration s’opéra ; la ferveur s’atténua… Un demi-siècle après leur venue dans le Nord de la France, ces femmes et hommes ne ressentirent plus la nécessité de se réunir au Cateau, allant jusqu’à laisser à l’abandon la propriété pendant 25 ans. Leurs descendants n’ont pas éprouvé le besoin d’entretenir une culture dont ils se sentaient, pour certains, éloignés, plus ou moins conscients de la nécessité d une intégration rapide sur leur nouvelle terre d’accueil. Voilà quelques temps, on pouvait encore apercevoir derrière les murs délabrés le donjon d’un petit Castel en ruine. Le terrain sur lequel il était érigé est devenu début  février un bien communal et ce, non sans mal…

Imbroglio juridique

Les maires du Cateau-Cambrésis ont cherché depuis longtemps à acquérir cette parcelle, sans y parvenir faute de joindre de façon durable un interlocuteur des nombreux actionnaires de la société anonyme le Foyer Cheptychyj. L’actionnariat de cette société est constitué en totalité de membres de la diaspora ukrainienne. Partis dès 1930, pour satisfaire les besoins en main d’oeuvre de la France, beaucoup sont morts aujourd’hui. D’où la difficulté pour la municipalité de trouver des personnes avec qui traiter. Venus de Galicie, ces ukrainiens arrivèrent dans notre région munis d’un passeport polonais puisque leur territoire, auparavant partie intégrante de l’empire austro-hongrois, fut rattaché à la Pologne après la Ière Guerre Mondiale. Les émigrants arrivés  sur notre sol étaient donc polonais sans avoir jamais cessé de sentir Ukrainiens. Ils éprouvèrent le besoin de se retrouver entre eux et financèrent à la fin des années 50 l’achat de cette propriété du Cateau-Cambrésis gérée par la SA Foyer Cheptychyj, du nom de l’ancien métropolite de Lviv, décédé en 1944. Les prêtres animaient un peu cette diaspora et insufflaient le sens et la mémoire de l’Ukraine, comme l’abbé Narozniak arrivé en 1945. Celui-ci vit encore et réside à Lille.

Témoin d’une époque

Baudouin Carbain (en médaillon) se souvient de l’arrivée de ses parents à l’aube des années 30, liés par un contrat d’un an dans une ferme. »Ma mère était bonne, mon père ouvrier agricole. Au bout d’un an, ils sont partis dans les usines. Mon père a travaillé à la cartonnerie de Gravelines, ma mère dans une soierie. C’était surtout à l’époque les fermiers qui avaient besoin de main-d’oeuvre. » Celui qui en juin dernier a cessé d’exercer la médecine se souvient du foyer Cheptychyj où il fut moniteur de colonie de vacances en 1958 et 1959. Il se rappelle aussi les messes dites en ukrainiens selon le rite gréco-romain. Âgé de 61 ans, il est l’un de ces enfants de l’immigration, symbole d’une intégration réussie. Né à Saint-Folquin (Pas-de-Calais), il a fréquenté la propriété catésienne à la fois centre culturel et religieux. Son père détenait une des 300 actions acquises pour 10 000F de la fameuse SA. En 1986, il a même adressé un courrier à l’Exarchat d’Ukraine à Paris, à qui le dernier président du conseil d’administration avait remis 50% des actions. Le 12 octobre, la société a été liquidée par le tribunal de commerce de Cambrai. Cette décision ouvrait la voie à la ville de Cateau-Cambraisis qui pouvait désormais se porter acquéreur pour 50 000F du bien des ukrainiens. C’est la mémoire de l’histoire des ukrainiens au Cateau qui s’estompe et une page qui se tourne.

Géraldine Beys.

(source et date inconnues)

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